AU SEUIL DU XXe SIÈCLE 121 exploitable. L’avènement de ces derniers à l’indépendance politique comporte leur libération économique ; il en résulte que la plupart des Israélites ont un vif intérêt à la compression du » slavisme » , et, comme il est clair qu’ils ne peuvent la réaliser par eux-mêmes, ils se trouvent amenés à favoriser par tous les moyens le mouvement pangermaniste. C’est ce qui explique pourquoi la presse socialiste de Vienne a favorisé de son mieux les manœuvres socialistes des Prusso-philes. Elle a étendu ses ramifications sur la Bohême, et bientôt les résultats les plus encourageants ont été obtenus. Un parti internationaliste s’est formé chez les Tchèques, mais, très rapidement, les ouvriers bohèmes ont vu clairement le piège qu’on leur tendait. Ils ont compris que les seuls principes applicables du socialisme étaient parfaitement compatibles avec les intérêts et les devoirs de leur nationalité et ils ont fondé un parti socialiste national qui poursuit maintenant à la fois l’amélioration pratique du sort des travailleurs et le succès de la cause tchèque. Dissimulée sous la forme sociale, l’action prussophile a donc été vaine auprès des Slaves cisleithans ; elle a réussi davantage avec des Allemands socialistes internationaux. Sur eux le Pangermanisme a eu prise indirectement. Lors-qu’en juillet 1899 le comte Thun, selon une tradition déjà ancienne, gouverna à l’aide du paragraphe 14 de la Constitution et décréta, en vertu de ce texte, un relèvement des taxes sur le sucre, l’alcool, la bière et le pétrole, les Prussophiles ont qualifié ces taxes de nouveaux impôts. Le mot d’ordre a été donné aux groupes socialistes viennois. Des manifestations se sont produites aussitôt, et l’on a pu voir dans les rues de la capitale des bandes criant : « A has le gouvernement! A bas le comte Thun! » La situation du ministère s’en est trouvée plus difficile, et c’est ainsi qu’une tactique adroite a su mettre au service du roi de Prusse les forces révolutionnaires, alors qu’individuellement les ouvriers allemands autrichiens internationalistes ne sont