l’entente franco-italienne
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appris. Ferry, avec un rare courage, reniait ce qu’il appelait « les utopies de sa jeunesse1 »; Gambetta avait éprouvé, au gouvernement de la Défense nationale, quelle force représentaient réellement les bandes indisciplinées de Garibaldi et quel fonds on pouvait faire sur l’amitié d’une nation qui avait cherché à profiter de nos malheurs pour s’emparer de Nice et de la Corse. Sans provoquer l’Italie, ni dédaigner d’entretenir de bons rapports avec elle, ils surent faire passer la grandeur de la France avant toute considération étrangère à ses intérêts, et, dans la hiérarchie des puissances européennes, ils mirent l’Italie à une place secondaire. Le ministre des affaires étrangères, Barthélemy-Saint-Hilaire convainquit le président du conseil, Jules Ferry, de la nécessité d’aller à Tunis ; en même temps l’hôte tout-puissant du Palais-Bourbon, Gambetta, éclairé par la conviction entraînante de l’un de nos plus éminents diplomates, donnait main levée de l’opposition qu’il avait faite, jusque-là, à toute entreprise hors d’Europe. L’expédition de Tunis partit : le traité de Kassar-Saïd mit la Régence sous le protectorat français.
   Les coups de canon de Tunisie, les premiers que la France aittirés depuis ceux qui avaient retenti à Pontarlier, le 1er février 1871, comme le glas de notre agonie, ce renouveau de gloire qui jaillissai sur nos drapeaux, ce beau pays qui s’ajoutait à notre empire et dont l’instinct national sentai
  1. Discours et opinions de J. Ferry. VII p. 256. Cf. Rambaud Jules Ferry, p. 410 (Pion, 1903, in-8).
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