LA CONQUÊTE DU TOUAT 211 partis de Touareg armés venaient de temps à autre, en suivant les pistes de l’Erg, attaquer nos postes avancés du sud, ou razzier quelque douar de nos indigènes. Tous les ans nous voyions nos tribus organiser, dans les ksour au pied de l’Atlas, à El-Abiod-Sidi-Cheikh, à Brezina, à Moghrar, des caravanes qui portaient vers le sud des denrées de ravitaillement et en revenaient chargées de dattes. Enfin, quand, en 1886, Bou-Amama eut été chercher un refuge dans le Goura-ra, il nous fut facile de remarquer qu’il continuait à entretenir des relations avec les tribus du Sud-Oranais et du Sud-Est marocain, et que ses mokaddem y travaillaient activement contre la France. Ainsi la force des choses et la fatalité de notre expansion nous mettaient peu à peu en contact avec un monde nouveau; nous allions être entraînés nécessairement vers des contrées dont les habitants n’étaient ni des Marocains, ni des Algériens, mais, à proprement parler, des Sahariens indépendants que volontiers l’on confondait tous sous la dénomination de Touareg. Les négociateurs français du traité de Lalla-Marnia avaient probablement ignoré l’existence, au sud de l’Atlas, d’oasis relativement riches et populeuses. Sans doute ils s’en tenaient à l’expérience de Suetonius Paulinus, qui, au dire de Pline, racontait « qu’au delà de l’Atlas, jusqu’à un fleuve qui porterait le nom de Ger (probablement l’oued Guir), on traverse des déserts couverts d’un sable noir, au milieu duquel s’élèvent d’intervalle en intervalle des rochers comme brûlés, que ces lieux sont inhabitables à cause de la chaleur, même