64 INTRODUCTION Ainsi, par un jeu savant d’« alliances », d’« ententes » et de « rapprochements », la diplomatie italienne se prépare à toutes les éventualités et prend ses sûretés pour tous les cas. Au delà des combinaisons politiques actuellement réalisées, elle cherche à discerner les conjonctions nouvelles que des intérêts nouveaux préparent. Elle ne fait ni une politique de sentiment, ni une politique de parti : elle ne connaît que ses intérêts et, comme ils sont parfois contradictoires, contradictoires aussi sont ses alliances. Mais, concilier l’inconciliable, par une politique souple et adroite dont Machiavel aurait admiré les ressorts, n’est-ce pas là précisément l’art d'une diplomatie habile ? Se servir des traditions révolutionnaires et des passions anticléricales pour séduire le gouvernement français et, en même temps, supplanter en Orient la vieille France dans son rôle de protectrice du catholicisme et rester les alliés de l’empereur allemand et les garants du traité de Francfort ; maintenir la triple alliance comme une efficace précaution et, en même temps, contrecarrer dans les Balkans l’influence autrichienne ; mener de front un rapprochement avec la Russie et une politique qui tend à rompre l’équilibre balkanique et à détruire le statu quo garanti par l’accord austro-russe; attendre de l’Angleterre le maintien de l’équilibre dans la Méditerranée et, en même temps, préparer l’occupation de la Tripolitaine avec l’assentiment de la France; pousser la France jacobine à une lutte contre la papauté où nous perdrons notre protectorat d’Orient et l’un des éléments