LA TRIPOLITAINE 315 point de le faire valoir ? C’est ce que nous nous demanderons maintenant. La Tripolitaine est aujourd’hui trop connue pour que nos voisins espèrent y trouver, le jour où elle tomberait entre leurs mains, la clé du Soudan ou le débouché d’un très grand commerce. Il y a beau temps que la fameuse prédiction de Rohlfs a perdu tout crédit : « Celui qui possédera Tripoli, écrivait-il, sera le maître du Soudan; la possession de Tunis ne vaut pas la dixième partie de celle de Tripoli. » En dépit de la formule, plus frappante que vraie, du célèbre voyageur allemand, nous serions imprudents d’offrir aux maîtres, quels qu’ils soient, de la Tripolitaine, d’échanger, contre leur lot, notre Tunisie. C’est d’abord un pays de colonisation que les Italiens, n’ayant plus le choix dans l’Afrique partagée, espèrent acquérir sur les rivages des Syrtes. Ils n’ignorent pas cependant que toute la Tripolitaine, si l’on en excepte de rares oasis, est et sera toujours rebelle à la culture; quelques puits qui pourraient être creusés, quelques oasis artésiennes qui pourraient être créées, ne suffiraient pas à transformer le désert en un jardin ou le steppe en un champ de blé. Mais, en Cyré-naïque, quoique l’étendue cultivable ne dépasse pas les limites du plateau de Barka, les paysans de l’Italie du Sud et de la Sicile trouveraient une terre où un certain nombre d’entre eux pourraient vivre plus à l’aise que dans les Pouilles ou les Calabres. C’est pour cette raison que plusieurs députés socialistes au parlement de Montecitorio, comme le fameux agitateur sicilien de Felice, se