66 INTRODUCTION ceux qu’elle en attend dans l’avenir : quels sont donc ceux que la France, de son côté, a obtenus ou espère. Nous faisons volontiers de la politique une affaire de sentiment ; nous aimons nos alliés comme un amant sa maîtresse, mais souvent ces unions passionnées restent stériles et n’engendrent pas. Les Italiens, eux, sont à l’abri de pareils enthousiasmes, ils gardent toujours au fond du cœur le sentiment, qu’ils ont hérité de l’ancienne Home, de leur supériorité sur tous les « barbares». La « fraternité latine » elle-même, dont ils savent si bien parler à propos, n’a jamais obscurci chez eux le sens de leurs propres intérêts. Nous ne doutons pas delà sincérité des sympathies actuelles d’une grande partie du peuple italien pour la France ; avec un admirable esprit politique, il sait d’instinct accommoder ses sentiments aux besoins changeants de sa vie nationale ; mais gardons-nous de nous faire illusion sur la portée et les conséquences de ses démonstrations. Pour les mêmes raisons profondes qu’à l’heure où il l'écrivait, le mot de Jules Ferry reste strictement vrai : « Il n’y a pas, il n’y a jamais eu, de nos jours, de parti français au delà des Alpes 1. » Cherchons donc l’intérêt de la France dans l’entente franco-italienne. Napoléon III a fait l’Italie et il y a gagné la Savoie et Nice ; que gagnerons-nous à faire la « plus grande Italie » ? M. Loiseau qui, dans son livre, nous a si bien montré les bénéfices que l’Italie attend de son en- 1. Jules Ferry, Préface à la Tunisie, do Narcisse Faucon, dans Discours et opinions, t. V, p. 537.