96 LA QUESTION DU MAROC civilisé; l’Algérie, la Tunisie sont dominées par les Français. Le Maroc seul reste réfractaire à toute pénétration : c’est qu’il ne renferme pas, comme la Turquie d’Europe ou la Syrie, une couche de populations chrétiennes qui vit et s’agite sous une suzeraineté musulmane, ou, au contraire, comme l’Algérie-Tunisie, une population musulmane gouvernée par des chrétiens. Point de mélange ni de relations avec les mécréants dans l’empire du chérif; l’on n’y trouve que des juifs, si méprisés et si accoutumés, par une longue soumission, à l’infériorité de leur état, qu’ils constituent à peine, dans le monde marocain, un élément hétérogène. Les étrangers ne sont tolérés qu’à grand’peine à Tanger; et encore est-ce « Tanger la chienne », honnie des vrais croyants, pour avoir subi la souillure du contact des infidèles. Le mouvement religieux, au siècle dernier, s’est traduit ici par quelques édits de Mouley-el-Hassan et par l’éclosion de sectes nouvelles ; les uns comme les autres tendaient à rendre plus rigides les prescriptions rituelles, les abstinences plus rigoureuses, les pratiques plus étroites. Les coutumes qui règlent le mariage et la condition des femmes, qui se sont modifiées si profondément en Turquie et en Egypte, n’ont subi au Maghreb aucune altération : garder les habitudes et les traditions d’autrefois, éviter toute compromission avec les civilisations chrétiennes modernes, telle •» été la tendance constante, sinon toujours des sultans, du moins des populations et des confréries marocaines. Et, si l’on invoquait au Maghreb l’exemple de Constantinople et de son padischah, l’on enten-