176 LA QUESTION DU MAROC sortir et rétrograder sur Fez, où le sultan vient lui-même de rentrer. Pour comprendre l’extraordinaire lenteur de ces mouvements militaires et l’incertitude des résultats, il est nécessaire d’oublier complètement les notions que nous avons, en Europe, sur ce qu’est une guerre, ou une révolte, ou une lutte entre deux compétiteurs pour la possession d’un trône. Rien de pareil au Maroc. Le Rogui n’a pas sous ses ordres une nombreuse armée ; campé dans les montagnes qui environnent Taza, tantôt chez lesTsoul ou les Hiaïna, tantôt chez les Riata, il n’a avec lui que quelques centaines d’hommes. Veut-il tenter un coup de main, apprend-il que les troupes du sultan marchent à sa rencontre, il appelle à lui les tribus qui lui sont fidèles et, surtout si l’on prévoit quelque pillage, les contingents accourent. L’armée est aujourd’hui de 3000 ou 4000 hommes, demain elle sera de 500. Il en est de même, d’ailleurs, de l’armée du sultan ; elle n'est ni mieux-organisée, ni composée d’éléments plus disciplinés. Sauf un petit noyau de Mokhazni, elle se compose des contingents des tribus fidèles, que le sultan convoque quand il a besoin d’eux et qu’il renvoie ensuite. Actuellement, il vient de rentrer à Fez et il a donné congé à ses troupes, en proclamant qu’il se faisait scrupule de les retenir au camp au moment où les travaux de la culture les réclament. Nos journaux y ont vu une manière adroite de dissimuler ses défaites et de masquer les défections de ses soldats. C’est là une exagération : pas plus que nos anciennes armées féodales, les armées chérifiennes ne peuvent être