356 BIZERTE craignaient qu’en cas de guerre, il ne fournît à l’ennemi un point de repère, visible à très grande distance, pour régler le tir de ses canons -, ils redoutaient que, démolie par les obus, sa carcasse ne vînt à obstruer le passage. Mais par quoi le remplacer? Quel moyen trouver qui soit pratique en temps de paix, pour les Bizertins, et qui permette, en cas de guerre, de concentrer rapidement les troupes sur un point quelconque du secteur à défendre, sans gêner la navigation ? Le projet d’un tunnel a des défenseurs chaleureux : il aurait le double avantage de libérer le canal de toute servitude de passage et d’assurer à la garnison une voie decommunicationabritéeet toujours libre. On s’est résigné, pour le moment, par raison d’économie, à l’établissement de deux bacs à vapeur à chaîne immergée. L’entrée du canal était protégée par deux jetées; celle du nord, longue de 1023 mètres et celle de l’est, de 950 mètres, s’avançaient au-devant l’une de l’autre et délimitaient un avant-port triangulaire de 86 hectares. Juste dans le prolongement du canal, entre les deux musoirs, surmontés chacun d’une tour-phare,une passe de 420 mètres s’ouvrait. Cette disposition n’empêchait pas la grosse mer de s’engouffrer dans l’avant-port et d’y produire des ensablements. En outre, les événements de Santiago de Cuba attirèrent l’attention des marins sur un inconvénient plus grave : un bâtiment, venant du large, pouvait,en gouvernant droit devant lui, entrer à toute vitesse jusque dans le chenal et, en s’y échouant, « mettre en bouteille » l’escadre qui aurait cherché un refuge