14 INTRODUCTION nations européennes1, que les différences entre les peuples « latins » sont, peut-être, aussi accentuées et aussi nombreuses que les ressemblances. La « grande famille » est, en tout cas, une famille singulièrement disparate et dont les membres n’ont ni le même passé, ni les mêmes mœurs, ni les mêmes conceptions politiques et sociales 2. Le « pacte de famille » d’autrefois pouvait avoir une raison d’être puisqu’il était fondé, à défaut de la parenté des peuples, sur la parenté des rois ; mais le « sentiment latin », le « patriotisme latin », s’il a pu à la rigueur servir à édifier des théories politiques, ne saurait suffire à devenir le pivot d’un système de politique extérieure et la raison primordiale d’une alliance. Il faut donc chercher ailleurs, dans le domaine des réalités pratiques et des intérêts matériels, les raisons qui peuvent justifier une entente intime entre les peuples « latins » et particulièrement entre la France et l’Italie. 11 n’y a pas de « politique latine », mais il y a, dans une certaine mesure, une politique méditerranéenne. Il n’y a pas de « race latine», mais il y a, entre les peuples riverains de la Méditerranée, certaines ressemblances. Pas plus que les fleuves, les mers, lorsqu’elles ne sont pas très larges, ne sont des barrières ; souvent, au contraire, elles servent de lien entre les pays qui les 1. Esquisse psychologique des peuples européens (Alcan, 1903, in-8). 2. Sur la distinction, qu'il y a lieu de faire, de la « race physiologique » et do la« race historique », voyez les deux conférences de M. Brunetière sur l'idée de Patrie et sur le Génie latin dans ses Discours de Combat (Perrin, 1900, in-12.)