120 LA QUESTION ALBANAISE la région la moins administrée, et, à coup sûr, l’une des plus pauvres de l’Europe : rien de mieux accepté que les distributions de secours, même collectifs. Nous sommes en pays de loyalisme équivoque : les begs ne sont pas rares auxquels il importe peu qu’une puissance ou une autre règne nominalement en Albanie, pourvu qu'ils conservent les privilèges de leur féodalisme sui generis. Nous sommes en pays où ni la race, ni la religion ne sont uniformes; où il est facile d’exploiter tantôt le fanatisme musulman, tantôt le ressentiment chrétien, tantôt la cupidité du fonctionnaire turc, tantôt le vague désir de chacun de sentir la vie humaine et la propriété sous la sauvegarde d’une autorité un peu forte. La politique des consuls austro-hongrois consiste, au fond, à vulgariser l’idée qu’un jour ou l’autre leur gouvernement sera cette autorité-là. Tous les cultes, tous les intérêts, l’ordre public et même peut-être l’amour-propre «schkipetar », sont censés devoir en bénéficier. Aussi leurs avances et leurs largesses s’ins-pirent-elles publiquement des éphémérides de la monarchie de Habsbourg. C’est pour concilier des