ROUMANIE. 53 Considérations militaires et politiques. Au point de vue militaire et politique, la Roumanie peut avoir un rôle important à jouer. Interposée entre la Russie et la Bulgarie, elle intercepte les routes aux armées russes dont l’objectif serait Constantinople ou Sofia. Tant que les principautés moldo-valaques, impatientes de la suzeraineté ottomane, cherchaient à profiter des complications orientales pour reconquérir leur indépendance et se constituer, les Russes étaient pour elles, des alliés naturels. Elles subissaient volontiers l’influence russe ; leur religion était la même; des fonctionnaires russes dirigeaient ou surveillaient leur administration; leur langue paraissait même menacée de perdre son individualité et les caractères cyrilliques se substituèrent, pendant un certain temps, aux caractères romains. Depuis 1856, au contraire, les puissances européennes leur ayant donné, sous leur protection collective, les garanties qu’ils réclamaient, les Roumains virent, dans les Russes, des voisins exigeants, dont les intérêts ne se conciliaient pas avec les leurs. De son côté, la Russie ne peut observer d’un œil sympathique le développement de la nation roumaine, qui s’est soustraite à sa tutelle. Jusqu’à présent, elle a pu ne pas en tenir compte, mais si la Roumanie, soutenue par une grande puissance militaire, entendait faire respecter sa neutralité, ou bien, si son armée formait une aile des armées austro-hongroises, les conditions dans lesquelles la Russie pourrait engager la guerre dans la Péninsule des Balkans, se trouveraient considérablement modifiées.