162 LES PAYS BALKANIQUES. pouvait être question de les expulser. Il fallait donc les transformer telles quelles en sujets de l’Empire. « Il fallait au soldat de l’islam, au satellite du calife, au chevalier de Mahomet, au Turc en un mot, substituer un être nouveau, Y Ottoman, qui pouvait être musulman ou chrétien, mais qui s’honorerait d’être le sujet d’un grand pays et pourrait devenir un patriote1. » Cette tentative de Midhat-Pacha a échoué. 11 n’en reste pas moins ce fait très caractéristique : c’est qu’il avait réussi à se donner pour alliés le cheik-ul-islam ou chef de la religion, les softas de Constantinople, et le chérif de la Mecque, Husni. « On a vu pendant quelques mois ce spectacle extraordinaire des autorités spirituelles réduisant l’islamisme à ses termes les plus simples, élaguant de la doctrine toutes les superstitions, tous les préjugés, toutes les légendes quil’ont corrompue, la ramenant à quelques dogmes essentiels et rationnels, et, surtout, limitant son action en l’excluant formellement du domaine de la politique. » Midhat-Pacha se disait alors en communion d’idées et de principes avec les philosophes positivistes et rationalistes de l’Occident, et leur présentait le Coran expurgé comme le code idéal d’une religion naturelle universelle. Le règne d’Abdul-Hamid a été le signal d’une réac- et raffermit les consciences. Les populations chrétiennes attendirent, dès lors, leur affranchissement politique et religieux du chef puissant qui créait le grand empire slave de l’Europe orientale. (Ce fait peu connu a été mis en lumière par M. Klaczko : Évolution du problème oriental. — Revue des Deux-Mondes, novembre 1878). 1. Voir les études de M. Gabriel Charmes sur la Turquie : Revue des Deux-Mondes, 1882.