204 LE PANGERMANISME EN AUTRICHE et le colosse russe. Enfin, et ceci est terriblement grave, si l’Allemagne parvient à reconstituer cet empire formidable, la Russie se voit coupée de l'Europe occidentale non plus par cette monarchie austro-hongroise, qui constitue tout au plus une barrière à claire-voie, mais par une énorme masse allemande, bardée de fer, hérissée de baïonnettes, et qui s’étendrait triomphante de Kiel à Trieste. Que l’Allemagne réussisse et les flottes russes, elles aussi, sont bloquées définitivement dans l’Europe orientale, trouvant la route maritime vers l’ouest barrée par les escadres allemandes et dans la Baltique et dans la Méditerranée. Le triomphe de l'Allemagne signifierait pour la Russie la fin de son influence en Europe, il anéantirait l’effort colossal accompli par elle depuis cinq siècles pour y prendre pied, il la rejetterait définitivement vers l’Asie, la reléguant au rang de puissance extra-européenne, de puissance asiatique. Devant une menace pareille,est-il exagéré de penser que le Gouvernement de Saint-Pétersbourg, soutenu, de plus, par le sentiment national, de la Russie tout entière, ne pourrait qu’intervenir et préférer le risque d’une guerre, si terrible qu elle dût être, à la situation d'isolement absolu, à la ruiné de toutes ses espérances, à l’expulsion d’Europe, qui seraient pour lui la conséquence fatale de l’annexion à l’Allemagne de l’Autriche allemande et du triomphe de l'idée pangermaniste? Reste alors la France. On peut prétendre que la