— 91 — En 1848 l'élément démocratique s’empara dans la Révolution de la première place. La lutte pour la Bohême prit aussi nécessairement un autre caractère. Ce n’est plus un duel entre la dynastie à tendances absolutistes et la noblesse oligarchique et jalouse de ses privilèges politiques, mais c’est bien le peuple qui entre en scène et réclame le droit au développement de son individualité, c’est la nation tchèque tout entière qui exige le respect de ses droits soit de la part de la dynastie, soit de la part des autres nations privilégiées. Dans la lutte politique des éqoques précédentes le peuple ne jouait aucun rôle ; à présent, dans la solution du problème autrichien, c’est le peuple seul qui aura à intervenir et la noblesse sera nécessairement rejetée au second plan. Mais il y a encore un autre changement. Jusqu’en 1848 la lutte nationale du peuple tchèque se concentrait dans ses efforts littéraires. Réveillé depuis un demi-siècle il souffre sous le joug féodal et absolutiste ; toute la lutte nationale ne fut menée que par une poignée d’hommes courageux et dévoués à la cause du peuple. Maintenant la nation tout entière entre en lutte. La lutte pour la vie nationale devient beaucoup plus politique que littéraire. Le réveil littéraire se transforme en réveil politique. C’est ce changement dans le caractère de la lutte pour l’indépendance du peuple tchèque et pour son existence nationale qui fut amené par la Révolution. C’est la conséquence de l’émancipation des paysans, car c’est par elle que la lutte des nationalités est devenue une guerre de masses. Les paysans asservis, opprimés, misérables ne comptaient pas comme facteurs dans cette lutte mais affranchis, relevés dans leur dignité personnelle