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à la conférence de Bucarest pour conseiller une solution équitable de toutes les questions en suspens, recommandant d’accorder l’égalité politique et la liberté de conscience à toutes les nationalités des Balkans. Ni les Serbes, ni les Grecs, ni les Roumains ne tinrent compte de ces sages conseils. Leur premier soin, le traité signé, fut de fermer toutes les églises et écoles bulgares, de chasser, d’emprisonner et même de massacrer évêques, prêtres, instituteurs et tous ceux que leurs sentiments patriotiques, jadis manifestés au grand jour, vouaient à leur rage de vainqueurs mesquinement rancuniers. Tous les livres religieux bulgares furent brûlés et il fut même défendu aux Macédoniens de se sentir en quelque sorte Bulgares. On les obligea à changer de nom. Les désinences bulgares, albanaises, turques furent remplacées par le itch et le vitch serbes. Tel fut le régime inauguré en novembre 1912 et dont l’enquête dans les Balkans organisée par les soins de la Dotation Carnégie pour la Paix Internationale s’occupe en détail.
  Cependant le député serbe Skerlitch termine son discours du 18/30 octobre 1913, à la Skouptchina, par ces mots :
   Nous ne pensons pas que les résultats territoriaux soient tout. La Serbie agrandie n’est pas pour nous un pays où le nombre des gendarmes, des percepteurs et des contrôleurs des monopoles aura doublé. Il faut dans la nouvelle Serbie — la Plus-Grande-Serbie — plus de liberté, plus de justice, plus de bien-être public. Que la Serbie deux fois plus grande ne soit pas deux fois plus faible, mais deux fois plus forte».
   En présence de la réalité : difficile est satiram non scribere.
  Tandis que les Serbes de Bosnie, d’Herzégovine, de Dal-matie, de Croatie et du Banat ne cessaient d’avoir la pleine jouissance de leurs droits politiques, d’être maîtres de leurs églises, de leurs écoles, d’avoir leur littérature, leurs journaux, leurs institutions caritatives et culturelles à eux, leurs frères de race de Serbie libre interdisaient aux Bulgares macédoniens, sous les peines les plus sévères, de prier en leur idiome, de parler leur langue, voire d’enterrer leurs morts avec leurs propres prêtres ! La tyrannie jusqu'au bord de la fosse de l’oubli !