I IO LA RÉVOLUTION ET LA ItÉ.VOTIOX une entente. Le gouvernement hongrois ne pouvait, sans s’enlever son titre même, accepter une ingérence quelconque du ministère de Vienne dans les affaires hongroises ; il ne pouvait pas suspendre ses préparatifs contre Jelaôic qui, lui, n'arrêterait pas les siens, car il n’avait pas obéi davantage en mai et en juin. Le rescrit royal n'était ni assez constitutionnel pour que le ministère pût l'accepter, ni assez franchement hostile pour que la responsabilité de la rupture retombât évidemment sur la cour. Pour épuiser les ressources de la légalité, Batthyâny fit appel à la représentation de la nation, au Parlement. Kossuth, le 4 septembre, proposa, au nom du gouvernement, d’adresser à l’Europe un manifeste pour lui exposer le droit de la Hongrie, d’élire une commission chargée de s’entendre avec les Croates, et d’envoyer au roi une députation pour lui porter les demandes du pays. Le jour même où cette députation, dans son audience à Schônbrunn, ne recueillait de l’empereur que des paroles vagues, les journaux d’Agram apportèrent à Vienne le texte d’un rescrit du 4 septembre, qui rétablissait Jelaôic dans toutes ses dignités. Le ban avait exigé ce signe de faveur, pour raffermir son autorité qu'on commençait à discuter en Croatie, et la cour avait cédé, tout en désirant que la publication fût retardée de quelques jours, pour ne pas exaspérer la Hongrie. Le rescrit était d’apparence légaliste : l’empereur assurait Jelaôic qu'il était assez convaincu de son patriotisme pour ne pas le croire capable de vouloir séparer de la couronne de Hongrie les parties annexes. Mais l’acte même était significatif: Batthyâny donna sur le champ sa démission, et plusieurs membres de la députation se livrèrent à des manifestations révolutionnaires. Esterhâzy, le ministre a latere, avait déjà démissionné, de sorte que le gouvernement se trouvait sans contact avec la cour. Ses délégués n’avaient pas été reçus par le roi ; ils n’avaient pas été consultés sur la réponse à faire à la députation du Parlement. « La députation », dit son président, « n’a pas pu découvrir quels sont désormais les conseillers du roi dans les affaires hongroises » '. Batthyâny et ses amis n’avaient cependant pas perdu tout espoir. Ils croyaient pouvoir cette fois se débarrasser de Kossuth, constituer un ministère homogène, offrir ainsi des garanties à la cour et s’entendre avec elle. Mais elle ne distinguait plus, si même elle avait jamais distingué, entre leur loyalisme et les visées révolutionnaires de Kossuth. Pourtant, elle ne voulait pas encore 1. Konyi. Dei'lh, II. 117.