LA REVOLUTION (1848-1849) deinent sur eux, ils sont devenus capables d’enthousiasme pour un idéal, et de sacrifices pour aider à l’atteindre. Des deux côtés de la Leitha, la transformation est complète à ce point de vue ; la société privilégiée, allemande en majorité en Cisleithanie, presque exclusivement magyare en Transleithanie, est remplacée par une société qui comprend tous les citoyens et qui se caractérise désormais par sa bigarrure nationale. L’émancipation d’ailleurs a profité à toutes les nationalités. Sans doute, les résultats en ont été plus sensibles pour celles qui étaient jusque-là effacées. Aucune des nationalités autrichiennes ne doit plus à la Révolution que les Tchèques ; c’est par elle que, dans les pays où ils avaient été les maîtres autrefois, et où, depuis leur défaite, la bourgeoisie était en grande majorité allemande et la noblesse indifférente, ils sont arrivés à reprendre le premier rang. L’émancipation seule leur a permis de soutenir l’effort par lequel ils ont ressuscité leur nation, qui, depuis la Montagne Blanche, paraissait morte. Mais les Magyars, nation privilégiée autrefois, n’auraient pas opposé à l’absolutisme germanisateur de Bach une si victorieuse résistance, s'ils n’avaient pas eu à mettre en ligne, derrière leur aristocratie nationale, les masses paysannes élevées par l’émancipation à la conscience nationale et à l’enthousiasme pour la Constitution ; pas plus que sans elles ils n’auraient pu, après 1867, organiser le nouvel Etat hongrois. Les conditions de la lutte nationale se sont ainsi transformées par l’affranchissement des paysans, et en même temps son caractère ; de littéraire et d'historique qu’elle était jusqu’alors presque exclusivement, sauf chez les Magyars, elle est devenue politique, et l'est restée. Quelques mois de liberté de la presse et de liberté de la tribune avaient suffi à donner pour toujours au mouvement des nationalités cette direction nouvelle, démontrant une fois de plus quel lien indissoluble unit les idées de nationalité et de liberté. Même les programmes nationaux ont été fixés alors d’une façon presque définitive, et sont encore aujourd’d’hui dominés en grande partie par les idées émises en 1848. Ainsi par ses conséquences, aussi bien les plus directes que les plus éloignées, l’émancipation des paysans, le plus grand des résultats de la Révolution, a marqué sa trace profonde dans l’histoire de la monarchie. Ni la cour ni le gouvernement 11e pouvaient fermer les yeux à cette transformation complète et à ses suites. Si même l'un ou 1 autre avait pensé sérieusement à une restauration de l'ancien régime, il eût dû y renoncer aussitôt, car la restauration était impossible sans le rétablissement de la féodalité, auquel on 11e