X INTRODUCTION ont lourdement pesé sur nos aïeux, ne sont plus aujourd’hui que les réminiscences historiques d’une époque définitivement disparue », et proclame « l’harmonie entre le trône et la nation 1 ». Comment expliquer ces brusques changements, ces apparentes contradictions, ces différences essentielles dans la situation des deux États que le dualisme unit, sous le même Souverain, dans la monarchie austro-hongroise ? Pourquoi la Hongrie aspire-t-elle à se dégager de son union avec l’Autriche, où elle semble trouver tant d’avantages, et pourquoi l’Autriche, depuis trente-sept ans, accepte-t-elle de jouer le second rôle dans cette union, où son nom figure le premier ? Pourquoi le régime parlementaire marche-t-il, en Hongrie, de triomphe en triomphe, tandis que l’Autriche est par degrés retombée à l'absolutisme? Pourquoi l’empereur et roi, sans cesse tiraillé entre la tradition du passé et l’appel de l’avenir,, tantôt se raidit-il contre les prétentions croissantes des Hongrois,, et tantôt au contraire, accumulant les concessions, précipite-t-il le mouvement qui, chaque jour, déplace davantage vers Budapest le centre de gravité de l’Autriche-Hongrie, en passe de devenir-une Hongrie-Autriche ? Seule l’histoire politique répond à ces questions. Seule aussi, en retraçant la succession des régimes que la monarchie a usés depuis 1848, en montrant comment ils ont été conçus et accueillis, quels résultats ils ont produits, pour quelles causes ils ont échoué, et quelles traces profondes ils ont laissées, elle révèle exactement la nature même du problème autrichien, elle en fait mesurer la portée, elle fournit les éléments d’une opinion raisonnée et sûre sur la question d’Autriche. Il vaut la peine de se faire cette opinion, si la question d'Autriche, comme on l’a souvent répété depuis quelques années, intéresse vraiment en dernier ressort l'ordre, l’équilibre, la paix, l'existence même de l’Europe. Le Compromis domine l’histoire politique contemporaine de l’Autriche-Hongrie. Il la divise en deux périodes bien tranchées, inégales de durée et différentes de caractère. La première, courte, agitée, diverse, est remplie par la lutte de la Hongrie contre les différents systèmes de centralisation autrichienne qui, de 1849 à 1866, se succèdent dans une fuite rapide ; elle se termine par le traité de paix que l’empereur, représentant de l’unité de la monarchie, et la Hongrie signent, en 1867, sur la base du dualisme. La seconde, plus longue, plus calme, plus homogène dans son développement, voit s’accomplir l’évolution lente et régulière qui 1. Rescrit au comte Tisza, 18 avril 1904.