LA RÉVOLUTION ET LA RÉACTION une action puissante par ce qu’elle a détruit, et par les germes qu’elle a semés. Sur les nationalités et sur les partis, son influence a été décisive, et les effets n’en ont pas encore cessé ; le gouvernement aussi a reçu d’elle une orientation nouvelle. L’histoire de la monarchie de 1848 à 1867, et en grande partie de 1867 à nos jours, ne s’explique que par la Révolution. Les dates d’avril et d’octobre 1848 divisent la Révolution en trois périodes bien distinctes : l'effondrement de l’ancien régime, la reconquête de l’Autriche, la guerre de Hongrie. Après avoir retracé dans ce cadre l’essentiel de son histoire, il conviendra de dégager des faits les leçons qu’ils contenaient et d’indiquer quelles ont été les conséquences durables de la Révolution. I La monarchie autrichienne, depuis i8i5, ne se soutenait pas par ses propres forces : elle était étayée du dehors. Sa durée était liée à la durée de l’ordre européen institué par le Congrès de Vienne. Toutes les atteintes qu’il subissait l’atteignaient aussi. L’agitation qui se répandit en Italie et en Allemagne en 1847 'ut pour elle un symptôme menaçant. La chute de Louis-Philippe, ouvrant la Révolution pour toute l’Europe centrale, la précipita dans la crise la plus grave qu’elle ait jamais traversée. En Europe comme en Autriche, Metternich passait pour l’âme de la réaction. Pour l’Europe, l’opinion avait raison ; pour l’Autriche, elle lui faisait tort. Il ne possédait pas dans la monarchie la toute-puissance qu’on lui prêtait : des hommes d’État dirigeants de l’Autriche, il était peut-être le moins réactionnaire ; par ses fonctions mêmes, il voyait de plus haut et plus loin que ses collègues ; dans l’intérêt de la politique extérieure, il eût voulu quelques réformes ; pour ne pas laisser à la Prusse l’avance du libéralisme, il avait projeté la convocation d’Etat généraux autrichiens. Mais la légende était faite, et ses ennemis, redoutables par le nombre et surtout par l’influence, la propageaient ardemment. Une faction puissante, menée par des membres delà famille impériale, lui faisait ouvertement opposition. L’archiduc Jean, oncle de l’Empereur. combattait sa politique réactionnaire : l’archiduchesse Sophie, son voltairianisme et son joséphinisme. Cette princesse énergique et ambitieuse, « l’homme de la famille » 1, belle-sœur de I. Treitschke, Deutsche Gesch.. IV (d’après le ministre do Prusse à Vienne).