64 l’ancien régime Magyars, Saxons et Sicules 1 ; les Roumains, qui formaient la majorité de la population, n’avaient pas de droits politiques. Les Saxons, isolés dans cet angle extrême de la monarchie, tenaient au maintien de la Constitution de 1691, qui leur garantissait une importance hors de proportion avec leur nombre ; ils tenaient aussi à ce que le grand-duché restât indépendant du royaume de Hongrie, car ainsi il était rattaché plus solidement à la monarchie, et ils étaient Allemands de race, Autrichiens de sentiments, dévoués à l’empereur d’Autriche au moins autant qu’au roi de Hongrie. Mais la noblesse magyare de Transylvanie, irritée par les tendances absolutistes et réactionnaires du gouvernement, qui, en vingt-cinq ans, ne convoqua pas une seule Diète, entraînée par le mouvement constitutionnel et national du royaume, désireuse d’étendre dans le grand-duché l’influence de sa nationalité, adopta la formule de l’union avec la Hongrie, et ce programme, qui pouvait invoquer certains précédents historiques, fut accueilli dans le royaume avec enthousiasme. Le mouvement de réforme était à peine commencé qu’il plaçait ainsi la Hongrie en face des problèmes les plus redoutables et les plus compliqués : par quelque côté que l’on entreprit de toucher à l’ancienne Constitution, c’était tout son édifice vermoulu qui menaçait de s’écrouler. A mesure que les idées nouvelles se précisèrent et qu’elles remportèrent leurs premiers succès, les divers courants qui, à l’origine, s’étaient confondus dans la tendance réformatrice, se dégagèrent et se divisèrent. Le comte Etienne Széehenyi avait été, vers i83o, l’initiateur de la réforme économique. Il voulait avant tout tirer sa patrie de l’isolement et' de la stagnation, lui faire connaître les nouvelles idées et les nouvelles méthodes économiques, surtout celles qu’il avait étudiées lui-même en Angleterre. Dès ce moment, il avait déjà aperçu les conséquences sociales et politiques des changements qu’il préconisait : l’égalité devant l’impôt, les transformations nécessaires de la Constitution et des lois. Ses idées conquirent rapidement l’opinion. Les meilleurs esprits se rallièrent au principe de l’imposition universelle ; il ne fut plus combattu que par la masse de la noblesse inférieure. Les luttes sur cette question dégénéraient en véritables batailles qui ensanglantaient les assemblées de comitats : François Deék, dès lors la plus haute autorité morale de la Hongrie, refusa de représenter à la Diète de 1840 son comitat, Zala, parce que les élections 1. Székely, Szekler en allemand. Le mot Sicules est employé d’ordinaire en trançais. Les Sicules sont un rameau de la famille magyare.