LE DIPLÔME D'OCTOBRE soulèvement du public, que le journal officiel excusât sur la complaisante « faute d’impression » ce défia l’opinion. Le 20 octobre, on avait pu organiser à Vienne une maigre illumination ; au retour de l’empereur de Varsovie, le mécontentement général se marqua par une abstention complète ; quelques jours plus tard, il fallut interrompre la publication des statuts, qui menaçait de déchaîner à la fin une émeute. Telle avait été la gradation du sentiment public. Il fallait une victime expiatoire : Goluchowski était tout désigné. Nul doute qu’il ne fût inférieur à sa tâche ; ses juges les plus indulgents se bornent à lui reconnaître les mérites d’un bon fonctionnaire ; il fallait plus à ce moment. Lemberg, d’où il sortait, n’a jamais été une bonne école pour apprendre à gouverner l’Autriche. Ses subordonnés, loin de le guider et de l’avertir de ses fautes, travaillaient à l’induire en erreur : au ministère, ce provincial semblait un intrus ; s’il n’exigeait pas de ses fonctionnaires les courbettes des paysans ruthènes, il les traitait du moins de haut, sans grâce. Aussi l’aidaient-ils volontiers à se compromettre : Lesser, legs de Bach à l’ère nouvelle, et toujours prêt à mettre son talent administratif au service de la politique préférée en haut lieu, trahissait doucement son chef depuis qu’il le sentait ébranlé. Les Hongrois étaient complètement brouillés avec lui. Clam-Martinic, qui avait visé le ministère d’Etat, d’où sa raideur et son orgueil seuls l’avaient écarté, faisait agir contre son rival toutes ses ressources. Pendant que Goluchowski se berçait dans sa gloire, ses fautes, ces intrigues et tout un ensemble de causes auxquelles il était étranger, préparaient sa chute, soudaine, et qui ne surprit personne plus que lui '. A Varsovie, l’empereur avait espéré s’assurer contre la Sar-daigne le concours de la Russie et, par elle, de la Prusse. Mais il n’en rapporta que des paroles vagues et des promesses platoniques. L’espoir de former une nouvelle Sainte-Alliance ainsi déçu, il fallait d’autant plus que la monarchie, privée d’appuis à l’extérieur, trouvât dans son organisation intérieure la force nécessaire pour résister à des agressions menaçantes et maintenir sa situation et son prestige. L’agitation contre le Diplôme devenait donc doublement gênante, la force des idées plus ou moins séparatistes en Hongrie doublement dangereuse. Peut-être aussi, avec son esprit à la fois mobile et obstiné, l’empereur faisait-il déjà supporter aux 1. Il trouva un matin sur la table de son secrétaire le décret qui le révoquait. Meyer, Erlebmsse, II, 5.