6 l’ancien régime borné leur ambition à faire l’État autrichien, ils y auraient sans aucun doute réussi : leurs forces y suffisaient ; mais elles ne suffisaient pas à restaurer l’Empire. Ils lâchèrent la proie pour l’ombre ; et, lorsqu’ils reconnurent leur erreur, il n'était plus temps de la réparer. Sous l’influence de ces diverses causes, l’État autrichien prend, dès la formation de la monarchie, les caractères essentiels qu’il a conservés durant toute son histoire : il est absolutiste, militaire, bureaucratique et centraliste, germanisateur. — Entre les Etats héréditaires, la Bohême et la Hongrie, il n’y a, au début de leur union, qu’un lien : le lien dynastique ; tout progrès de l’autorité personnelle et absolue du souverain, tout recul de l’influence des Diètes, citadelles du particularisme, est donc un gain pour l’unité. Sous des rois faibles et incapables, la royauté, en Bohême et en Hongrie avait été annihilée, le domaine mis au pillage. Ferdinand fît sentir aux Diètes que désormais sur le trône il y avait un véritable roi. — Avant tout, il revendiqua la souveraineté militaire : l’armée devint exclusivement monarchique, et commença d’être l’école du loyalisme autrichien. — Le domaine reconstitué fut administré par des fonctionnaires qui ne relevaient que du roi : en Bohême et en Hongrie, comme dans les Etats héréditaires, ils furent contrôlés et dirigés par les conseils qui siégeaient à Vienne ; ce fut la première étape de la centralisation administrative. Celle-ci naît de l’absolutisme, et engendre la germanisation. — La germanisation n’a point alors, elle n’aura pas pendant longtemps de sens national. L’idée allemande est étrangère à cette dynastie, dont la cour est espagnole, bourguignonne et française, et la politique universelle. Mais l’État autrichien, pour ses souverains, n’est que le prolongement des pays héréditaires : Vienne en est la capitale administrative ; des États héréditaires, que la dynastie possède depuis deux siècles et demi, elle tire ses serviteurs les plus sûrs ; c’est aux Universités allemandes qu’ils ont puisé les doctrines du nouveau droit monarchique ; l’allemand est la langue des fonctionnaires, des autorités centrales, du roi lui-même ; il est la langue du gouvernement de l’Empire, qui ne se sépare pas du gouvernement de la monarchie. Ce sont des principes politiques allemands que l’administration royale s’efforce désormais de faire triompher dans les deux royaumes, en allemand, et par des Allemands. L’affinité naturelle de ces trois termes, absolutisme, centralisation, germanisation, est évidente : ils forment d’emblée une trinité inséparable. L’État