LA RÉACTION (1849-1859) i85 sa nation. C’est alors, et alors seulement, qu’est devenue irrévocable la scission qui, dix ans plus tard, sera enregistrée par le Compromis. Les observateurs qui pouvaient juger de l’état d’esprit de la Hongrie reconnaissent qu’à ce moment, en lui rendant ses droits essentiels, son existence légale, on pouvait encore obtenir d’elle toutes les concessions nécessaires à l’unité autrichienne '. Le chagrin de l’impératrice à la nouvelle de l’insuccès de la pétition5 s’explique par une intuition politique autant que par sa sympathie passionnée. Après cette déception, en effet, il n’y a plus de rapprochement possible entre l’Autriche et la Hongrie. Puisqu’il plaît à l’empereur de s’en tenir immuablement au système, il ne reste à la Hongrie qu’à attendre le bouleversement extérieur, qui, selon la tradition autrichienne, entraînera un changement de régime. Deâk donne comme consigne d’entretenir dans la nation le sentiment constitutionnel pour pouvoir, au moment favorable, d’un trait de plume restaurer la Constitution Les signes d’espoir se multipliaient pour les patriotes ; ils connaissaient les appuis puissants qu’ils avaient en haut lieu ; Deâk était renseigné sur tout ce qui se passait dans le pays par une police volontaire, très supérieure à celle du gouvernement ; on constatait l'affaissement du système et on voyait en même temps se former au dehors l’orage qui devait1 le balayer. Pendant ce temps, les suppôts de Bach avaient pleine confiance dans les formules de leur chef, et ne doutaient pas du succès final. La résistance était si faible ! « Le peuple est bon, il n’y a que la soi-disant élite intellectuelle qui se tienne un peu sur la réserve \ » Le peuple lui-même, en réalité, n’est pas pour le système; il suit ses chefs, et partout les chefs sont contre Bach et sa méthode, parmi les Magyars comme dans les autres nationalités, et pour les mêmes raisons. Les Slovaques avaient été, durant la Révolution, de précieux auxiliaires pour les troupes impériales : sacrifiés par Windischgrâtz à l’aristocratie magyare, ils le sont ensuite par Bach à la bureaucratie allemande. Germanisés également, les Croates, qui avaient sauvé la monarchie, et qu’en récompense on traitait maintenant comme les Italiens et les Magyars, sinon plus t. Rogge, I, 461, 480. Le témoignage île Rogge a de la valeur parce qu'il vivait à ce moment en Hongrie. 2. 4 mag.-riemz. lürt.,\. 479. 3. Beksics, Kemény /s., 176. 4. Ce mot charmant est. d’après Rogge (1. 488|, du vice-président du gouvernement à Buda.