l’ancien régime entreprises, sent le besoin du dégager ses lianes ou d'assurer ses derrières, lorsqu'il se résigne à abandonner la moins importante ou la plus facile à reprendre de ses tentatives, la Hongrie profite de ses embarras : elle bénéficie de compromis, qu’elle doit parfois à ses propres efforts, plus souvent aux succès de ses alliés. Elle recueille ainsi les fruits de ses sacrifices, et, si elle porte les charges d’une situation européenne, du moins elle en retire les avantages. Pendant le siècle des luttes civiles, de 1606 à 1711, le mot d’ordre est, du côté des Habsbourg, l’absorption, du côté des insurgés l’indépendance absolue1. Les Hongrois, qui ont appris de longue date a se défier de la maison d’Autriche, qui connaissent son système pour le voir à l’œuvre en Autriche et sur leur propre sol, qui sentent leur nationalité et leur foi! menacées, jugent qu'il n’y a point avec cette dynastie d’entente possible ; la séparation complète et décisive s’impose. Les Habsbourg, conscients de cette haine, entretenus dans leurs préventions contre les Hongrois par des conseils intéressés, possédés de leurs rêves, de domination universelle, exaltés par leur triomphe en Bohême et par leurs premiers succès sur les Turcs, s’acharnent à fondre entièrement dans leurs Etats ce pays qui paie par la révolte contre leur autorité légitime la protection qu'il a trouvée chez eux contre les infidèles. Cependant une sorte de pressentiment arrête chacun des deux adversaires devant les dernières conséquences de sa doctrine. Léopold Ier a certainement eu, ou ses ministres ont eu pour lui l’intention d’abolir la Constitution hongroise : sa politique en Hongrie ne se comprend pas autrement ; mais jamais il 11e l’a déclarée expressément ; et si, à la Diète de 1687, il revendique en théorie le droit de donner de son autorité absolue des lois à ce pays qu’il a arraché aux Turcs et aux insurgés, c’est pour reconnaître aussitôt la validité des anciennes lois hongroises, à la seule condition qu’elles soient modifiées selon ses indications. De même, si le but final des insurgés est d’enlever aux Habsbourg le trône de Hongrie, ce n’est qu’à la dernière insurrection qu’est proclamée leur déchéance \ Il semblait que jamais la Hongrie et 1. ErbfuLgekntg, I, 146-7. 2. 11 y a parmi tes royalistes des protestants, parmi les insurgés des catholiques; mais, dans l’ensemble, la division religieuse coïncide avec la division politique. Le calvinisme, religion d'une grande partie de la race magyare, est appelé souvent “ la foi magyare”. 3. A l’instigation de la France.