LE DIPLÔME D'OCTOBRE Avec la liberté constitutionnelle, le Diplôme voulait donner à la monarchie l’unité qui lui était nécessaire pour accomplir sa mission envers ses peuples et envers l’Europe. La liberté constitutionnelle, il suffit d'examiner la condition du Reichsrath pour s’en convaincre, est fort voisine de l’absolutisme. Quant à l'unité, elle diffère bien peu du dualisme. Sans doute, la monarchie aura désormais,'dans le Reichsrath, un organe représentatif commun ; mais, à cette seule exception près, et qui, pratiquement, ne compte guère, c’est le dualisme d’avant 1848, l’ancienne juxtaposition d’une Hongrie constitutionnelle et d’une Autriche absolutiste, que le Diplôme restaure presque inconsciemment. Dans le vague de ses indications, un seul fait précis se distingue : dans les pays hongrois, les lois nouvelles — lois constitutionnelles et lois électorales — se rattacheront au droit historique, si modifié qu’il puisse être sous prétexte d’adaptation aux nouvelles conditions politiques et sociales ; dans les pays cisleithans, le ministère d’État et la bureaucratie auront toute latitude pour fabriquer des statuts provinciaux, et ceux-ci sûrement ne brilleront pas par un excès de liberté. Toutes les promesses du Diplôme — égalité de principe entre tous les pays de la monarchie — toutes les recommandations des rescrits — respect des traditions historiques et satisfaction des besoins du présent — ne peuvent rien changer à ce fait : la Hongrie, constitutionnelle jusqu’en 1848, le redevient; l’Autriche, bureaucratique et absolutiste depuis près de trois siècles, le reste. Cette contradiction fondamentale, c’était le dualisme; le dualisme, dont la Révolution avait révélé le danger pour la monarchie ; le dualisme, contre, lequel Bach s’était vainement acharné ; le dualisme, que le Diplôme se proposait d’abolir, alors qu’il en était lui-même tout pénétré. Dualisme partout, dans le principe, dans l’application, dans les influences subies, voilà le trait caractéristique du Diplôme ; c’est lui qui en explique l’imperfection, les contradictions, l’échec inévitable ; c’est lui encore qui fait comprendre pourquoi tous les systèmes politiques qui se disputent la domination de l’Autriche — centralisme, fédéralisme, dualisme — ont pu, avec une apparence de raison presque égale, se réclamer de lui. — Dualisme de principe. Entre le droit et l’octroi, le Diplôme hésite sans cesse, et cherche une conciliation impossible, ou plutôt l’imagine réalisée par la simple proclamation de la volonté impériale. Après le 20 octobre, ily a dans la monarchie deux groupes politiques, deux principes de droit public. Les pays hongrois, au sens le plus