LE DIPLÔME D’OCTOBRE a3i l’unité économique. — et par sentiment de classe, puisque l’aristo-cratie est fédéraliste. Les représentants des nationalités moins historiques ou simplement « ethniques » \ Croates, Serbes, Roumains, Ruthènes, hésitent et se divisent. Les deux formules proposées peuvent également les menacer : d’un côté la magyari-sation ou la polonisation, de l’autre la germanisation. Selon la diversité de leurs traditions et des expériences qu’ils ont faites sous l’absolutisme, ils se rangent à droite ou à gauche. La Croatie, par la voix de l’évêque Strossmayer, vote avec la majorité : elle a des droits historiques à revendiquer, et le régime de Bach l’a d’autant plus exaspérée qu’elle avait contribué à lui frayer la voie. La Voïvodie serbe vote avec la minorité, car elle doit à l’absolutisme son territoire national, dont la Hongrie réclame maintenant la réincorporation. Le représentant des Ruthènes, plus sage, s’abstient : il ne voit dans aucune des deux motions de garantie pour sa nationalité. De même l’évêque roumain de Transylvanie, Siaguna : entre l’oppression historique des Magyars et l’oppression centraliste des Saxons, il ne peut pas choisir. Avec deux absences et six abstentions, le projet de la majorité, très légèrement amendé *, fut adopté par trente-quatre voix contre seize. L’empereur, en recevant le Reichsrath en audience de congé, promit d’examiner les deux motions et de prendre une décision dans le plus bref délai possible. L’opinion était restée assez indifférente aux débats du Reichsrath. Elle jugeait trop mince ce « couronnement » des réformes, et sa défiance subsistait. A Vienne, on lisait à peine les comptes-rendus des séances ; seul, l’épisode de Maager avait rappelé l’attention sur eux 3. En Hongrie, au contraire, à mesure que la session se prolongeait, l’intérêt et la faveur publics augmentaient. L’hostilité du début avait diminué, lorsqu’on avait connu les déclarations d’Apponvi et d’Andrâssy, leurs attaques contre le système de Bach, surtout contre le ministre de la justice, le comte Nâdasdy, un Hongrois que tous ses compatriotes regardaient comme un traître parce qu’il avait servi l’absolutisme, leur énergique affirmation du droit de la Hongrie. Après dix années d’op- 1. Expression de Gumplowicz, employée ici à titre purement indicatif. 2. « Là où les points d’attache historiques ou n’existeront pas ou se trouveront dans un passé trop lointain, il y aura lieu de créer des institutions analogues à celles des pays qui recouvreront leurs droits historiques, de manière à assurer l’égalité des droits politiques et des devoirs civiques. » 3. Dreissig lahre, 1,47-8.