LA RÉVOLUTION (1848-1849) III pousser les choses à L’extrême. Sa politique était d’obtenir de la Hongrie, sans violences, les concessions indiquées dans le mémoire autrichien. Mais la défiance qu’elle inspirait était si profonde, sa maladresse si grande, que toutes les mesures qu’elle prenait tournaient contre elle. Le palatin essaya de profiter de la démission du ministère pour prendre à lui seul l’exercice du pouvoir exécutif, sans doute au profit de la cour. Mais toute la Chambre protesta contre cette violation des principes parlementaires : Kossuth reprit sa démission et s’arrogea aussitôt une sorte de dictature. Il fit décider immédiatement une émission de papier-monnaie hongrois, l’organisation d’une armée nationale, l’autorisation pour les soldats de ligne d’entrer dans cette armée ; de plus, la promulgation immédiate de ces lois, sans attendre la sanction du roi. C’était la première mesure véritablement anticonstitutionnelle, le premier acte révolutionnaire. Le palatin s’excusa, et la Chambre lui vota sa confiance. 11 proposa à Vienne Batthyâny comme chef du nouveau ministère. C’était le seul nom acceptable à la fois pour la cour et pour la Hongrie. Mais Batthyâny exigeait, avant tout, qu’il fût fait défense à Jelaôic d’attaquer la Hongrie, et Jelaôic à ce moment même envahissait le territoire hongrois. La cour, gênée, incertaine, adopta la politique de tergiversation. Batthyâny, ne pouvant obtenir de réponse à ses demandes, démissionna de nouveau, reprit encore sa démission, resta, en droit, seul ministre hongrois pendant quinze jours, jusqu’au 27 septembre. Mais la sollicitude suspecte de Kossuth l’avait déjà, malgré ses protestations et celles de Deâk, flanqué d’une commission parlementaire de six membres qui devait l’assister jusqu’à la constitution définitive d’un ministère. Cette commission est l'origine du comité de défense, qui fut le gouvernement révolutionnaire de la Hongrie. La situation du pays à ce moment était à désespérer les plus courageux. Kossuth n’exagérait pas en s’écriant : « Nous sommes attaqués de huit côtés à la fois. » Dans la Haute-Hongrie les Slovaques, en Transylvanie les Roumains, se soulevaient à la voix de chefs nationaux ou d’officiers impériaux ; dans le Banat, les hostilités se poursuivaient de plus en plus atroces entre Serbes et Hongrois. Jelacic, avec quarante mille hommes, marchait sur Pest, et les officiers impériaux de l’armée qui devait l’arrêter déclaraient que, liés envers le roi par le même serment que lui, ils ne voulaient pas le combattre. La nation était abandonnée par son chef légal : le palatin avait en vain essayé d’amener le ban à