L ANCIEN RÉGIME 33 s’exercent encore sur eux. C’est le moment où la vie féodale commence à décliner en Hongrie, pour faire place à la vie de cour. Les grandes familles passent les hivers à Vienne : elles y brillent, elles y étalent la magnificence et le luxe hongrois ; elles s’y ruinent lentement, sans s’en apercevoir ; mais elles s’y pénètrent d’esprit autrichien, elles s’allient et s’incorporent à cette aristocratie panautrichienne dont les Habsbourg ont de tout temps favorisé la formation. L’influence autrichienne en Hongrie va ainsi grandissant jusqu’à Marie-Thérèse ; elle atteint son apogée sous la grande reine, qui a porté à sa perfection cette originale méthode d'assimilation ; sous Joseph, la réaction commence. Appuyée sur ce pouvoir qu’elle exerce sur la société hongroise, la dynastie est d’autant mieux en situation de mettre à profit le pouvoir politique qu'elle tient de la Constitution même, ou de ses propres usurpations. plus ou moins légitimées. Les pouvoirs constitutionnels du roi sont considérables, et lui assurent, non-seulement dans la direction des affaires publiques, mais encore sur le sort et la condition des différentes classes de la société, une influence capitale. Le roi a droit à la fidélité de tous les nobles : une condamnation pour « infidélité » entraîne la perte de la noblesse de la famille, c'est-à-dire la plus terrible des peines ; et c’est le roi lui-même qui juge par commissaires ces causes *. Il est le patron du clergé, distribue les bénéfices ecclésiastiques, surveille et fixe, dans les limites de la loi, les droits des protestants. 11 confère la noblesse, les titres, les privilèges, les exemptions, tous les honneurs et les emplois. Il est le chef de la justice, nomme les juges, confirme ou adoucit les arrêts ; pouvoir particulièrement considérable dans un pays processif, dont le droit est très ancien et très embrouillé. 11 est le maître des villes, qui sont sa propriété, et qui lui témoignent une obéissance assez étroite pour les rendre suspectes à la noblesse. Il a la direction absolue de la politique étrangère, le droit de paix et de guerre ; si les Diètes ont autrefois prétendu participer à ce droit, il est redevenu propriété exclusive du monarque depuis que la dynastie autrichienne a repris la force de l’affirmer, et surtout depuis que la Pragmatique Sanction a créé un lien indissoluble entre la Hongrie et le reste de la monarchie *. De la même source découle la souveraineté absolue et exclusive du roi en matière de commandement militaire. Tels sont les pouvoirs que le monarque exerce en Hon- t Erbfolgekrieg, I, 157. 2. Erbfolgekrieg. 1, 158.