i8o LA RÉVOLUTION ET I.A RÉACTION Emile Dessewffÿ, est du 4 avril i85o. Elle veut prouver la nécessité de rendre à la Hongrie sa Constitution, et en même temps, pour éviter le retour de conflits aussi terribles que celui de 1848, de régler, sur une base solide, sur la base de la Pragmatique Sanction, ses rapports avec la monarchie. Elle proteste contre les tendances réactionnaires qu’on prête aux conservateurs, et affirme la nécessité de modifier les anciennes institutions politiques de la Hongrie, pour les adapter au changement accompli dans les conditions sociales, et en particulier au principe nouveau de l’égalité devant l’impôt. Elle porte vingt-quatre signatures de magnats. Szécsen, qui fait toujours un peu bande à part, n’y adhère pas immédiatement ; il est plus à droite que ses amis, et semble plus complaisant qu’eux à l’idée d’une réaction' ; mais sa pensée se meut dans la même direction que la leur, comme le prouve une série d’essais qu’il publie en i85i '. 11 y critique impitoyablement toutes les théories du libéralisme moderne, pour faire ressortir en face de ses défauts les mérites d’une politique qui s’inspire du développement historique, des besoins de la pratique, de l’expérience. Son livre déborde d’hostilité contre Bach, mais en même temps de loyalisme autrichien : Radetzky. Windischgrâtz, même Schwarzenberg y reçoivent un éloge enthousiaste5. 11 marque une date dans l’histoire constitutionnelle de la monarchie : car il formule, pour la première fois, la théorie, et il lance le nom des « individualités politico-historiques 4 » ; mais son importance n’apparaitra que quelques années,plus tard, avec le Diplôme d’octobre. L’ouvrage capital du moment est celui de Paul Somssich : Le droit légitime de la Hongrie et de son roi 5. Le titre même en indique le sens : c’est un plaidoyer pour le droit légitime, en tout et partout. Le ministère et ses officieux lui opposeront la théorie de la forfaiture ; il y répond d’avance : la seule force du pouvoir monarchique en Autriche est d’être légitime ; la révolution seule peut faire table rase, qu’elle vienne d’en bas ou d’en haut, mais jamais la légitimité ; le droit de conquête garantit sans doute la puissance, mais seulement aussi longtemps qu’il se soutient par la force ; il est juste de punir selon les lois ceux qui se sont soulevés, contre le droit historique, même d’exiger de la Hongrie le paiement 1. Szécsen, Polit. Fragen, 84-5. 2. Politische Fragen der Gegenwart, besprochen von Graf Anton Szécsen. 3. lb., 27-9, 84-S. 4. lb., 125. 5. Das légitime Recht Ungarns u. seines Konigs. ,