25o LES ESSAIS D’UNITÉ CONSTITUTIONNELLE perception d’impôts, toute poursuite pour retard, toute levée de soldats, jusqu’à ce que le Parlement, seul compétent en ces matières, ait pu se prononcer. Telle est désormais la formule de l’opposition légale, et qui sert aussi à satisfaire les impatiences de l’opposition révolutionnaire. Les comitats ne condescendent pas à correspondre officiellement avec la chancellerie et la lieutenance, qu’ils ne reconnaissent pas ; ils s’adressent personnellement à Vay et à Maj-lâth comme à des particuliers, à des patriotes capables de faire entendre au roi le vœu de la nation *. Ils ne se font sans doute pas d’illusion sur le sort réservé à leurs demandes, car, « n’ayant pas de raison de croire les hommes d’Etat de Vienne atteints de folie* », ils ne peuvent compter sur l’arrêt des impôts et des levées. Mais ils posent, par un procédé qui n’est pas nouveau dans l’histoire des luttes politiques en Hongrie, le droit en face du fait qui le viole, et, à force de nier ce fait, ils finissent par l’ébranler. Moins de deux mois après la publication du Diplôme, le comitat de Pest, une assemblée municipale, officielle, le traite comme s’il n’existait pas, mettant ainsi dans un singulier embarras les hommes qui ont entrepris de réconcilier par lui la Hongrie et la monarchie. Dans cet embarras, ils auraient eu besoin d’être soutenus par le succès en Autriche. Si le Diplôme était apparu à la Hongrie comme un acte inébranlable, voulu par le monarque, appuyé par les peuples cisleithans, la résistance hongroise aurait été plus difficile, les chances des conservateurs plus grandes. Mais, pour ne pas prendre les mêmes formes qu’en Hongrie, le mécontentement et la désapprobation n’étaient pas moins grands en Autriche. Ceux qui avaient été déçus par le Diplôme à son apparition ne se réconciliaient pas avec lui, et ceux qui l’avaient salué avec joie commençaient à reconnaître leur erreur. Les Slaves, à qui il avait plu parce qu’il mécontentait les Allemands, en découvraient après coup l’esprit réactionnaire. L’essence du Diplôme, pour l’Autriche cisleithane, c’étaient les statuts provinciaux, base de l’élection des Diètes qui elles-mêmes députaient au Reichsrath. Or, les premiers statuts qui parurent soulevèrent une indignation universelle. Pour inaugurer l’ère constitutionnelle, le ministère d’Etat avait l’inconscience de promulguer les statuts élaborés sous Bach. Dans certaines provinces, la noblesse et le clergé auraient eu autant de représentants que tout le reste de la population ; dans d’autres, la Diète ne devait avoir que voix consultative, et il fallut, devant le 1. Emlëkl tpok, 347.— Drei Jahre Verfassungsslreit, 81-2. 2. Kecskéméthy, Ein Jakr, 29.