LA RÉACTION (1849-1859) 181 des frais que la révolte a causés, mais ensuite tout sera expié, « et jamais il ne saurait être permis de réclamer comme victime expiatoire ce droit historique même, au nom duquel on a combattu et vaincu la Révolution 1 ». Ce droit historique, quel est-il ? Les lois de 1790 en constituent la base essentielle ; elles ont été jurées par trois rois, Léopold II, qui les sanctionna, François II et Ferdinand; en elles, on peut trouver le point de départ de la réorganisation de la Hongrie et de l’Autriche \ C’est donc la reprise du programme de 1847, et — ce ‘l11' caractérise la thèse de Somssich — l'abandon des lois de 1848. Il s’efforce de démontrer que la révolution hongroise n’a pas été antidynastique, que Kossuth lui-même n’a été entraîné à des actes attentatoires aux droits de la dynastie que par l’exemple de la révolution de Vienne ; car cette démonstration lui sert d’argument contre la théorie de la forfaiture ; mais, au demeurant, il admet que la Diète de 1848 a outrepassé ses pouvoirs. Il considère cependant ses lois sociales comme irrévocables ; mais ses lois politiques sont inadmissibles 3. C’est cette réserve qui fait en théorie et qui fit en pratique la faiblesse des conservateurs. Sur quoi, demandaient leurs adversaires, se fonde pareille distinction entre 1847 et 1848 ? Les lois sanctionnées — et celles de 1848 l’ont été — forment un tout et se valent. Si l’on déclare que les unes sont sans valeur et peuvent être, non pas légalement révisées, mais abolies, quelle garantie a-t-on que les autres seront respectées 4 ? Controverses encore purement académiques. Le ministère n’était pas disposé à essayer du programme des conservateurs. En vain ils représentaient à Schwarzenberg, dans des entretiens particuliers, que la Constitution était inapplicable, et que pareille tentative pouvait ruiner la monarchie : « Alors », répondait-il, « nous essaierons autre chose 5. » Nul doute qu’ils ne fussent impopulaires en Hongrie, plus même qu’ils ne méritaient. Mais nul doute non plus qu’il ne dépendît uniquement du gouvernement de les rendre populaires. S’il les avait mis en mesure d’apporter à ce moment à la nation opprimée la restitution même partielle de ses droits, il leur aurait assuré en Hongrie une influence dont l’idée autrichienne aurait été la première à profiter. 1. Somssich. Das légitimé Recht, 150; cf. 59,149. V. aussi DreiJahre Ver/'as-sungsstreil, 120. 2. Somssich, Das légitimé Recht, 158. 3. Somssich, Das légitimé Recht, 17-21, 143-7. 1 Beksics, Kemény 7.S., 155-6. 5. D’après le récit de Dessewffy. Kônyi, Deàk, 11,204.