224 FIGURES BYZANTINES jetés en prison, elle eut la bonne fortune de paraître moins dangereuse. On lui laissa sa liberté, et, en 1269, elle se retira en Espagne, chez sa nièce Constance, mariée à l’infan t don Pedro d’Aragon. C’est là qu’après tant d’aventures, enfin, elle trouva la paix. Elle y acheva pieusement sa vie, entrée comme religieuse au couvent de Sainte-Barbe à Valence ; et pour témoigner à cette austère maison sa reconnaissance, elle lui légua par son testament une image miraculeuse de la sainte patronne du monastère, et une relique insigne, un fragment du roc d’où jaillit l’eau qui servit à baptiser sainte Barbe. De son long séjour en Orient, c'était, semble-t-il, tout ce qu’elle avait rapporté. Toutefois, au temps lointain où elle épousait Vatatzès, l'empereur grec lui avait constitué un douaire; il lui avait donné trois villes, des châteaux nombreux, dont le revenu s’élevait à trente mille besants. Par son testament elle légua tous ses droits sur ces domaines d’Orient à son neveu don Jayme II, qui devait plus tard s’en prévaloir. Quant à elle, elle mourut obscurément vers l’année 1313, âgée de plus de quatre-vingts ans. Il y a quelque chose de mélancolique dans la destinée de ces princesses d’Occident, Berthe de Sulzbach, Agnès de France, Constance de Hohenstaufen, qui s’en allèrent, au xne et au xm° siècle, régner sur l’empire de Byzance, et leur figure indécise, presque effacée, en conserve une grâce touchante. Transportées par les jeux de la politique loin de leur pays natal, demeurées presque toujours étrangères au monde nouveau où le sort les avait jetées, ces princesses en