LES AVENTURES D’ANDRONIC COMNÈNE 93 trigue et la violence, la perfidie et la cruauté. Ce qui achevait de le perdre, c’étaient ses passions. « Comme un cheval fougueux », il se jetait dans toutes les aventures, avec une audace tranquille, un beau mépris de l’opinion publique et des conventions sociales. Trouvait-il sur sa route quelque belle personne, ou seulement en entendait-il parler? Vite il s’éprenait d’elle, et, pour faire sa conquête, il mettait tout en œuvre. Et comme c’était un charmeur, il ne semble point qu’il ait jamais rencontré de cruelles. Par le nombre et la pittoresque variété de ses intrigues amoureuses, Andronic Comnène fait penser à don Juan, et par la pointe de perversité dont il releva la plupart de ses aventures, il réalise assez bien le type du « grand seigneur méchant homme ». A l’occasion pourtant, ce chercheur de sensations nouvelles, mobile, volage et trompeur, se trouva capable de constance et de fidélité. Il finit en vieillissant par devenir terrible. Quand il s’agit pour lui de conserver le pouvoir qu’il avait conquis, lorsqu’il sentit le besoin de réveiller ses passions un peu amorties par l’âge, il se révéla cruel et débauché; mais alors même, jusque dans le vice et dans le crime, il garda une sombre grandeur. Nature géniale, il aurait pu être le sauveur, le régénérateur de l’empire byzantin épuisé : il ne lui manqua peut-être pour cela qu’un peu de sens moral. Malheureusement il n’employa ses hautes qualités qu’à satisfaire ses vices, ses ambitions, ses passions. Il y a dans l’âme d’Andronic Comnène quelque chose de l’âme d’uga César Borgia.