BYZANCE A L’ÉPOQUE DES CROISADES 9 recommandent l’emploi — pour se débarrasser de visiteurs incommodes et leur ôter l’envie de revenir. En I re l’empereur et les rois latins, ce sont les mêm es difficultés d’étiquette; et, de plus en plus, l’idée fait son chemin dans les têtes d’Occident, que, pour en finir avec ces alliés peu sûrs, avec cet empire grec plus nuisible qu’utile à la croisade, il n’existe qu’un moyen, c’est le recours à la force. Dans le camp de Louis VII comme dans celui de Barberousse, on pensa sérieusement à prendre Constantinople; vers le milieu du xnB siècle, on prépara un plan de croisade, non plus contre les infidèles, mais contre les Byzantins. Et lorsque, enfin, les désastres successifs des expéditions sacrées eurent enraciné peu à peu dans tout l’Occident la légende hostile à l’empire grec, lorsque aux vieilles rancunes grossies s’ajouta la conscience, de plus en plus nette, de la richesse et aussi de la faiblesse de Byzance, les Latins ne résistèrent plus à la tentation. Les barons de la quatrième croisade, partis pour délivrer le Saint-Sépulcre, finirent par prendre Constantinople et par renverser le trône des basileis, — avec la tacite complicité du pape, et aux applaudissements universels de la chrétienté. L’établissement d’un empire latin sur les ruines de la monarchie de Constantin froissait trop cruellement le patriotisme byzantin, pour que cette solution brutale pût calmer les vieilles rancunes et apaiser l’antagonisme des deux mondes. La chute, après un demi-siècle à peine d’existence, de ce faible et éphémère état creusa plus profondément encore l’abîme entre Byzance et ses vainqueurs. Désormais, les princes temporels de l’Occident, que ce fussent un Hohen-