L’IMPÉRATRICE IRÈNE DOUKAS 63 trice de ses maux ». Et ainsi, peu à peu, elle devenait toute puissante. On a vu précédemment comment l’ambitieuse princesse tenta de tirer parti de son crédit, et quelles trames se nouèrent autour du lit où Alexis agonisait. On a vu également avec quelle sollicitude Irène, jusqu’à la fin, soigna le moribond, comment, pour obtenir de Dieu sa guérison, elle multiplia autour d’elle les aumônes et les prières, de quel courage viril elle fit preuve en ces tristes jours, « luttant comme un athlète d’Olympie contre la peine qui l’accablait », quelle ténacité aussi elle montra pour arriver à ses fins et quels furent enfin son désespoir et sa colère, quand elle vit irrémédiablement perdue la partie qu’elle avait engagée. Pourtant, devant l’inévitable, Irène sut se résigner mieux que sa fille Anne Comnène. Elle ne prit aucune part à la conspiration que celle-ci trama contre Jean son frère et elle disait à cette occasion, non sans quelque ironie : « Il faut chercher à faire un empereur, lorsque le trône est vide. Mais une fois qu’il y a un souverain, il ne faut pas le renverser. » Aussi bien, plus heureuse en cela que sa fille, Irène avait, après l’effacement de ses débuts, goûté dix pleines années durant les joies du pouvoir suprême. Et lorsque, Alexis étant mort, elle se retira dans un monastère, lorsque, selon l’expression d’un contemporain, « comme un aigle aux ailes d’or, elle s’envola vers les sphères célestes », elle pouvait se dire en somme qu’elle n’avait point manqué sa vie.