44 FIGURES BYZANTINES rioure à ce frère cadet détesté. Maintenant tout son rêve s’écroulait. L’audace de Jean Comnène, les hésitations de Bryenne renversaient d’un seul coup l’édifice de machinations si savamment construit par Anne et par Irène. La fille d’Alexis ne s’en consola point, et son ambition déçue, oblitérant tout autre sentiment en elle, alluma dans son cœur des fureurs de Médée. L’année n’était point révolue qu’elle tentait, par un complot, de ressaisir le pouvoir : il ne s’agissait de rien moins que de faire assassiner l’empereur Jean son frère. Mais, au dernier moment, Bryenne, de caractère un peu mou, et d’ailleurs médiocrement ambitieux, hésita : il semble avoir eu quelque doute sur la légitimité des prétentions de sa femme, et il déclarait fort nettement que son beau-frère avait tous les droits au trône. Ses scrupules, sa faiblesse paralysèrent le zèle des autres conjurés; grâce à ces atermoiements, la conspiration fut découverte. L’empereur au reste se piqua de clémence : il ne voulut aucune exécution et se contenta de confisquer les biens des conspirateurs. Peu de temps après même, sur le conseil de son premier ministre le grand domestique Axouch, il restituait à sa sœur Anne la totalité de sa fortune : humiliation suprême pour la fière princesse, à qui son frère rappelait ainsi, avec une magnanimité un peu dédaigneuse, ces liens et ces affections de famille qu’en un moment de folie elle avait si pleinement oubliés. Ce qui montre bien la rage furieuse qu’Anne Comnène ressentit de ce dernier échec, c’est l’anecdote que rapporte le chroniqueur Nicétas. Quand elle vit que, par les hésitations de Bryenne, toute l’entreprise manquait, elle, si chaste, si correcte, s’emporta contre