202 FIGURES BYZANTINES Pourtant, à l’égard du comte Louis — qui était son cousin — elle entra en rapports avec lui. » Depuis vingt-quatre ans que ses parents de France avaient oublié la petite princesse exilée à Byzance, elle aussi avait tout oublié de sa patrie. Elle ne s’intéressait plus qu’aux choses de Byzance, à la vieille haine que les Branas ressentaient pour Isaac Ange; comme une Grecque, elle s’indignait de l'intervention inopportune et néfaste de ces étrangers dans les affaires de la monarchie. Par tout cela, l'anecdote que rapporte Robert de Clari est singulièrement significative ; elle prouve à quel point Agnès de France s’était détachée de son pays. Ce qui suivit n’était guère propre à la réconcilier avec ses compatriotes. On sait comment le bon accord apparent entre Latins et Grecs ne tarda pas à se rompre, au cours de l’hiver que les croisés passèrent sous les murs de Constantinople, et comment, une révolution nationale ayant renversé les faibles et méprisables souverains qui occupaient le trône, les Occidentaux se décidèrent à conquérir Byzance pour eux-mêmes. On sait quelles furent, pendant plusieurs jours, les horreurs commises dans la ville prise d’assaut. Au moment où l’enceinte était forcée (12 avril 1204), Agnès de France, avec beaucoup d’autres nobles dames, avait cherché un refuge dans le palais fortifié du Boucoléon. Le marquis Boniface de Montferrat arriva à temps pour sauver de toute fâcheuse aventure la princesse et ses compagnes. Mais on imagine de quel œil elle dut voir le pillage de sa capitale, les palais mis à sac, les églises dévastées, Sainte-Sophie profanée et souillée, la population affolée fuyant de toutes parts, et la ville