124 FIGURES BYZANTINES la sépulture, voulant que, desséchés par le soleil, balancés au gré des vents, ils fussent comme ces épouvantails qu’on suspend dans les vergers pour faire peur aux oiseaux. » Les bûchers flambèrent dans l’Iiip-podrome, et, pour terrifier ses ennemis, l’imagination d’Andronic rêvait des supplices plus épouvantables encore : comme le jour où, pour punir un malheureux dont le seul crime était d’avoir mal parlé de l’empe reur, il songea à le faire embrocher sur une longue lige de fer et rôtir à petit feu et à faire servir ensuite ce plat d’un nouveau genre sur la table de la propre femme de l’infortuné. Ses familiers, ses parents eux-mêmes n’étaient point à l’abri de sa sombre défiance: son gendre et sa fille tombèrent en disgrâce pour avoir inquiété son jaloux absolutisme. Aussi, dans l’universelle épouvante, chacun tremblait pour sa tête : toute tranquillité avait disparu. Et Andronic, grisé par ses forfaits, déclarait maintenant qu’il avait perdu sa journée, lorsqu’il n’avait point fait exécuter ou aveugler quelque grand seigneur, ou du moins terrorisé quelqu’un de ses ennemis par son formidable regard de Titan. Justicier sans merci, inflexible adversaire de la turbulente féodalité dont il sentait le danger pour l’empire, exaspéré encore par les résistances, sourdes ou déclarées, qu’il trouvait autour de lui, Andronic joyeusement marchait dans le sang. Avec l’ambition et les terribles effets qu’elle entraînait, Andronic avait gardé son autre passion maîtresse : les femmes. Quoiqu’il fût chauve maintenant sur le haut du front et que ses tempes eussent blanchi, il avait toujours l’air jeune; toujours bien portant, souple et robuste, il conservait toujours sa mine fière et sa prestance héroïque. Il ne désarmait donc point.