208 FIGURES BYZANTINES Jean Boukas Vatatzès, empereur grec de Nicée, luttait avec un succès croissant contre le faible empire latin de Constantinople ; le temps où, en Occident, Frédéric II de Hohenstaufen recommençait, une fois de plus, sa guerre éternelle contre la papauté. Or Baudouin II, empereur de Constantinople, protégé du souverain pontife et ne se soutenant que par lui, se trouvait par là môme nécessairement hostile au grand empereur souabe, et la politique de Frédéric II devait naturellement s’efforcer d’atteindre ici aussi et de mettre en échec l’adversaire irréconciliable que le pape était pour lui. Dans ce but il n’hésita pas, lui catholique romain et latin, à faire alliance avec les Grecs schismatiques contre un état catholique et latin. Ceci n’est point pour surprendre, quand on se souvient quel libre et puissant esprit fut ce dernier des Hohenstaufen. Initié en Sicile, dès l’enfance, aux splendeurs des civilisations grecque et arabe, savant et épris de science comme un humaniste de la Renaissance, étrangement séduit en outre par les mœurs voluptueuses et violentes de l’Orient musulman, ce prince à l’âme cosmopolite et laïque avait entrepris d’arracher le monde à l’étreinte de l'Église, non seulement en détruisant la puissance temporelle de la papauté, mais en ruinant l’ascendant spirituel de Rome. Mettre fin pour jamais à l’inutile folie de la croisade, conclure la paix avec l’Islam, transférer du pape à l’empereur la direction suprême de la chrétienté, tels furent quelques-uns des rêves que caressa le vaste génie de ce souverain presque moderne. Ses ennemis déclarent qu’il ne croyait point en Dieu, qu’il niait l’immortalité de l’âme, qu’il proclamait, en