LES MARIAGES DES DERNIERS PALÉOLOGUES 275 ville et, sous prétexte de se distraire, elle se rendit dans un des magnifiques jardins des environs, avec celles de ses femmes qui parlaient sa langue, et quelques jeunes écuyers qu’elle avait amenés avec elle de son pays. Vers le soir, ayant préparé un navire, les principaux de Galata y montèrent et, s’étant approchés du rivage, ils prirent à bord avec de grands respects la princesse et la passèrent sur l’autre rive; et toute la population de Galata alla au-devant d’elle et la salua révérencieusement, comme leur dame et souveraine. Comme le soir tombait déjà, ceux de la ville ne se doutèrent point de l’événement; et ce n’est qu’au matin que les gens du palais en apprirent avec douleur la nouvelle. » En d’autres temps, les négociants de Gênes eussent sans doute payé cher leur insolente intervention; au premier moment, la population de la capitale, furieuse, ne parlait de rien de moins que de leur courir sus et de détruire leurs établissements. Mais l’empereur Jean était trop content d’être par ce moyen débarrassé de sa femme. Il apaisa la colère populaire, et laissa sans obstacle Sophie s’embarquer sur un vaisseau génois à destination d’Italie. De son séjour en Orient, elle ne rapportait nulle autre chose que le bandeau impérial, le stemma, qui parait la tête des basilissae. « Cela me suffit, disait-elle avec une mélancolique ironie, pour prouver que j’ai été et que je suis impératrice des Romains. Quant aux richesses que j’ai laissées là-bas, je n’en ai nul souci. » Revenue dans son pays natal, elle entra dans un monastère, et c’est là qu’elle termina, toute en Dieu, sa triste existence. Jean VIII, délivré de Sophie, se mit bien vite en quête d’une troisième femme. Il la trouva dans la