PRINCESSES D’OCCIDENT A LA COUR DES COMNÈNES 183 Pourtant, malgré cette bonne volonté réciproque, le ménage impérial ne tarda point à se désunir. La faute en fut, ce semble, aux deux intéressés. Irène, d’une part, se lassa assez vite de son rôle de protectrice des lettres. Elle se brouilla avec Tzetzès pour une misérable question d’argent. Le grammairien lui-même raconte qu’on lui avait promis de payer à raison de douze sous d’or chaque cahier de ses savantes dissertations. Pour faire montre de son zèle, il prit un papier de plus grand format, couvrit ses pages d’une écriture plus serrée, si bien, comme il le disait, qu’un seul de ses cahiers en valait bien dix. Il comptait qu’on le récompenserait en proportion : il n’en fut rien. L’intendant de l’impératrice prétendit payer à Tzetzès son travail selon le tarif préalablement fixé, et comme l’infortuné homme de lettres se plaignait du procédé, finalement on lui refusa tout net toute rétribution. Furieux, il s’adressa h la souveraine elle-même pour réclamer justice. Irène, qui ne comprenait rien à ces subtilités byzantines, envoya promener le malheureux grammairien. Celui-ci s’en vengea en racontant l’histoire : il détruisit en outre la première édition de ses Chiliades, et, lassé de travailler pour rien, il arrêta au chant XV de l'Iliade ses savants commentaires, et se mit en quête d’une autre protectrice. L’expérience littéraire tentée par l’impératrice avait assez mal réussi. Ceci eût été peu de chose. Mais, par ailleurs encore, Irène s’accommodait mal aux usages de sa nouvelle patrie. L’impératrice était, semble-t-il, une assez belle personne. L’archevêque Basile d’Achrida, qui prononça son oraison funèbre, dit que « par la stature de son corps, l’eurythmie de ses membres, ses