6 FIGURES BYZANTINES leurs fantaisies, et, par-dessus tout, bavards plus que tous les autres hommes de la terre », et comment, dès le matin, ces indiscrets visiteurs envahissaient le palais, sans nul souci de l’étiquette, importunaient l’empereur d’interminables discours, entrant chez lui avec leur suite sans même se faire annoncer, causant avec lui familièrement sans lui laisser même le temps d’aller déjeuner, et le soir, le poursuivant jusqu’à la porte de sa chambre à coucher, pour lui demander de l’argent, des faveurs, des conseils, ou tout simplement pour bavarder un peu. Les courtisans étaient scandalisés de ces manquements à l’étiquette. Mais Alexis, bon prince, et qui savait du reste l’humeur irritable de ses hôtes, leur passait toutes leurs incartades, soucieux avant tout d’éviter un conflit. Aussi voyait-on parfois des scènes assez étranges. Un jour, à une audience solennelle, en présence de toute la cour assemblée, un baron latin alla insolemment s’asseoir sur le trône même du basileus. Et quand le comte Baudouin vint le tirer par la manche pour le faire lever, en lui faisant observer que ce n’était pas l’usage à Byzance de s’asseoir en présence de l’empereur, et qu’il convient, quand on est à l’étranger, de se conformer aux usages du pays, l’autre, regardant Alexis de travers, se mit à marmonner entre ses dents : « Eh bien, en voilà un rustre, qui reste assis lorsque tant de grands capitaines sont debout! » Alexis, « qui connaissait de longue date l’âme orgueilleuse des Latins, » fit semblant de n’avoir rien remarqué; mais il se fit traduire la réponse du chevalier, et au moment où il levait l’audience, l’appelant auprès de lui, il lui demanda qui il était, et de quel pays. « Je suis un pur Français, dit l’autre, et de race noble, et voici ce