25 cependant pas que, par un effet de développements historiques imprévus, des intérêts étrangers puissent de nouveau s’implanter dans l’Adriatique sous le couvert des intérêts slaves et probablement en dépit de la volonté des Slaves eux-mêmes. Par exemple, à présent, qui dit Autriche dit Allemagne et, jusqu’à un certain point, l’Autriche est aujourd’hui la tutrice volontaire des intérêts germaniques. Mais le fait, pour l’Autriche, d’avoir, hier, témoigné moins de condescendance à cet égard ou de n’en avoir pas témoigné du tout, n’empêchait guère — c’est Henri Lorin (i) qui l’affirme — que Trieste et Fiume fussent « sous des apparences autrichiennes et hongroises, des ports surtout allemands, des organes méridionaux d’une ligne de domination dont Hambourg et Brème sont les correspondants sur la mer du Nord », de même que Pola « est l’arsenal méditerranéen des escadres allemandes ». Or un petit État se soustrait bien plus difficilement qu’un grand à cette espèce de services involontaires. Une Croatie plus ou moins indépendante de la Puissance danubienne — Hongrie ou Autriche-Hongrie — qui survivra éventuellement à la grande guerre actuelle, réussirait-elle, si elle était maîtresse de Fiume, à empêcher que ce port ne continue à rester commercialement et même, en quelque sorte, militairement, ce qu’il est à présent, c’est-à-dire un centre d’intérêts magyars et allemands? — Nous nous permettons d’en douter. Et, à ce propos, il convient de ne pas oublier que la Croatie a des siècles d’une histoire en commun avec la Hongrie et l’Autriche; son émancipation ne pourra, dès lors, s’effectuer que d’une manière assez lente. (i) Henri Lorin. La paix que nous voudrons. Paris. Alcan, Ed. 1915-