L’intérêt européen i. « La question de l’Adriatique — écrivait récemment Denis — est une question d’ordre universel, et il n’y a aucune exagération à dire que l’avenir du monde peut, dans une large mesure, en dépendre ». L’enseignement de cette vérité nous est venu de la grande guerre, et les multiples questions se rattachant au problème de l’Adriatique sont, du moins pour ce qui regarde la Monarchie des Habsbourg, une des causes, et non la moindre, qui ont déterminé l’immense conflit. Bien peu s’en rendaient compte auparavant. Ceux, très rares, qui en avaient l’intuition, appréciaient erronément ou n’appréciaient pas du tout l’importance que l’Italie, par sa position géographique et sa tradition historique, était destinée à assumer dans une lutte qui imposerait — comme c’est le cas aujourd’hui — la solution radicale du formidable problème. Pendant la période de la funeste alliance que nous avions subie, une partie considérable des sympathies que nous nous étions attirées autrefois allait en s’aliénant, surtout en France. On remettait à la mode la fameuse boutade de Thiers disant que la reconnaissance de l'Italie pour la coopération française de 1859 aurait eu « tout juste la durée de sa faiblesse» (1). Et, tant en France qu’en An- (1) Jacques Bainvuae. La guerre et l’Italie. Paris, Fayard & Cie Ed., 1916.