35 les moyens tendant à outrager, piétiner, détruire l’ita-lianité; s’il a dressé toute sorte d’embûches contre l’élément italien dans les écoles, dans les administrations, dans la vie publique et même dans la vie privée; s’il a, du fond de la fiuszta sauvage, poussé, vers la côte, d’inconscients troupeaux humains pour violer la liberté d’une cité ita-' lienne et étouffer jusqu’à son âme, les seules dix-neuf années de dictature croate demeurent encore une des pages les plus noires au milieu de tant de tortures. Le souvenir d’« Agram qui niait à Fiume la somme destinée à l’hospice des enfants trouvés pour la raison qu’on parlait aux nourrices «le langage profane d’Italie», est de ceux que le temps n’efface point, surtout lorsque, le pouvant, on n’a rien fait pour l’effacer. «Il est vrai — ajoute Tommaseo dans l’œuvre d’où nous avons extrait les paroles citées plus haut (i) — que le Ban de Croatie a, lui aussi, parlé italien autrefois. Savez-vous quand? Quand à la ville de Fiume il annonça la loi martiale, archange de la mort ». Espérer un régime croate libéral et respectueux de l’italianité de Fiume, c’est plaisanter ou ne pas savoir ce qu’on dit. Une bonne partie des Croates d’aujourd’hui diffère sensiblement, il est vrai — et l’élan de leurs volontaires ayant combattu dans les rangs de l’armée serbe le prouve — des Croates de Radetzky et de Haynau; mais la brutale incursion des gymnastes de la Sokol, envahissant, dévastant, ensanglantant les rues de Fiume afin de s’en faire croire les maîtres, ne date que de dix ans, et dix ans ne suffisent point à transformer un peuple. Quant au «joug italien», on doit au moins à la vérité de reconnaître que l’Italie n’a jamais opprimé, même au temps où, s’avançant, aigles en tête, elle enseignait à l’Europe la force et la civilisation de Rome. (i) N. Tommaseo. Il Serio nel Faceto. Florence, Le Monnier, Bdit., 1868.