84 LA QUESTION TURQUE ration étrangère : ne dirait-on pas que Yonous Nadi écrit sous la dictée de Tchitchérine? La politique à laquelle il prétend associer les nationalistes turcs, c’est évidemment la politique des Soviets. Comment deux nations que séparent, plus encore peut-être qu’une rivalié séculaire, leur race, leur religion, leur civilisation, leur état social, en sont-elles venues à admettre l’éventualité d’une collaboration ? il faut l'expliquer. Dès le printemps de 1919, c’est-à-dire dès l’origine du mouvement national turc, les Bolchéviks regardent du côté de l’Anatolie et observent avec attention tout ce qui s’y passe. On a prétendu, sans preuves certaines, qu'ils avaient des agents aux Congrès d’Erzeroum et de Sivas. Ce qui est bien démontré, c’est qu’ils s’installent à Trébizonde et y fondent deux journaux : l’un de langue turque, le Selamet, l’autre de langue grecque, YEpokhi. Les résultats de cette première entreprise sont à peu près nuls. Les agents de Moscou font un nouvel essai à Eski-Chéhir, où vivent de nombreux Tartares émigrés de Russie : ils y achètent un petit journal, le Kouroultaï, et commencent à exposer les doctrines communistes. Cette propagande agit sur les émigrés, mais laisse les Turcs indigènes parfaitement indifférents. Il faut recourir à d’autres moyens : dès que le mouvement insurrectionnel a pris une forme régulière et que la grande Assemblée s’est installée à Angora, le gouvernement de Moscou décide de lui envoyer des délégués. A Bakou, au congrès des Peuples d'Orient, Zinoview avait affecté le plus grand dédain pour le concours que pouvaient offrir au bolchévisme les populations orientales prêtes à