96 LA QUESTION TURQUE lion s’en poursuit d’autant plus aisément que personne n’a songé à expulser de l’Azerbaïdjan, de la Géorgie et du Transcaucase les agents allemands chargés de l’exécuter. A la fin de 1918, nous trouvons à Batoum, aux côtés de Nouri Pacha, frère d'Enver, et de Chevfik, commandant de la IXe armée turque, des officiers de la division allemande qui avait débarqué à Poti au mois de mai pour protéger la Géorgie (1). En 1919, ces mêmes officiers travaillent en étroit accord avec les comités du Tedjeddoud, succédané de VUnion et Progrès, surveillent les délibérations des deux Congrès d’Erzeroum et de Sivas, contrôlent enfin les relations de l’Anatolie avec les républiques du Caucase; dès qu’ils se sont rendu compte de la situation, leur principal et constant effort tendra à préparer, puis à maintenir l’accord entre Angora et Moscou, entre la Turquie nationaliste et la Bussie bolchévique. La tâche n’est point aisée, car, au contact de cette terre d’Orient, l’ancien impérialisme russe se réveille, même chez les représentants des Soviets ; et, parallèlement, on voit renaître chez les Turcs l’antagonisme traditionnel et les vieilles rancunes contre l'ennemi héréditaire. Busses et Turcs sont également pénétrés de l’importance du Caucase, qui peut servir de base, soit au bolchévisme pour ses opérations en Asie, soit à ses adversaires pour arrêter l’invasion russe. L’ancienne idée allemande, reprise par les Soviets, d’unir en confédération l’Azerbaïd-jan, la Géorgie, le Daghestan et l’Arménie, est re- (I) Voir un article très intéressant du commandant Poide-bard, dans la Revue des Études arméniennes, 1920.