CONSTANTINOPLE ET LE CONTRÔLE INTERALLIÉ 1 1 au mois d’avril 1921, il n’y avait pas à Constantinople moins de quatre services de renseignements français, indépendants l’un de l’autre, qui tous, bien entendu, faisaient ou prétendaient faire du renseignement politique (1). J’imagine, sans en être certain, que chacun des Alliés en entretenait tout autant. Les « collaborateurs .» de la police n'avaient vraiment que l’embarras du choix. Il n’y avait pas dans Péra un aigrefin, un courtier véreux, un entremetteur ou un chanteur de cabaret de nuit, qui n’émargeât au budget de quelque S. R. allié. Aux agents subventionnés s’ajoutaient les indicateurs bénévoles, soucieux d’obtenir une faveur ou d’assouvir une rancune. Les lettres de dénonciation affluaient aux ambassades, aux divers offices de l’armée, de la marine et de la gendarmerie. Le plus souvent, elles allaient tout droit aux archives, ou au panier. Il arriva pourtant que les renseignements qu’elles apportaient fussent pris au sérieux. Bien qu’elle fût placée sous les ordres d’un Anglais, la police interalliée de Constantinople était soumise à l’autorité collective des trois hauts commissaires : britannique, italien et français. Le jour où le général Harington prit le commandement suprême des forces alliées d’occupation, il revendiqua du même coup le contrôle unique de la police : n’était-ce pas à lui seul qu’il appartenait désormais de veiller à la sécurité des troupes et de leurs chefs ? On pouvait objecter que la police est un instrument du pouvoir politique et administratif, plutôt que de (1) Au mois de juillet 1921, ces quatre services ont été enfin réunis en un seul, qui fonctionne sous le contrôle du Haut-commissaire.