262 LA QUESTION TURQUE exclusive d’une grande puissance européenne, ou même d’une petite. Et l’inqurétude devait bientôt s’étendre à d’autres sphères, qu’on avait jusque-là tenues pour indifférentes aux vicissitudes du problème oriental, et qui au contraire, les suivaient très attentivement. * + * Au plus fort de la crise, un financier britannique, qui occupe à Constantinople une situation considérable, tint à un Français les propos suivants, dont je ne garantis point l’authenticité littérale, mais dont je puis certifier, quant au fond, la rigoureuse exactitude: « Il faut résoudre sans plus tarder la question de Constantinople. Résolvons-la à trois, ou à deux ; sinon, nous la résoudrons tout seuls. » Ces paroles revinrent aux oreilles d’un haut fonctionnaire américain, qui les jugea singulières. Elles furent aussi rapportées au représentant du Japon, qu'elles parurent amuser fort. « A trois? à deux? tout seuls?— disait lentement le Japonais. — Mais ce Monsieur ne sait pas compter. Nous sommes plus nombreux que cela à Constantinople. La question dont il s’agit, et quelques autres encore, ne se régleront pas sans nous, — j’entends sans nous tous. » Lorsqu’en mars 191&, la France et l’Angleterre avaient formellement reconnu les prétentions russes sur Constantinople, les États-Unis, n’étant pas daus le jeu, n’avaient rien dit ; le Japon marqua un peu de mauvaise humeur et beaucoup plus de scepticisme. Deux ans après, en signant avec l'Allemagne le traité de Brest-Litowsk, la Russie libérait elle-